(www.ipsnoticias.net) avril 2011
La mécanisation de la récolte de canne, qui s’est imposée pour éviter que les brûlis des champs de canne continuent de polluer l’air, a amélioré le sol des zones productrices du sud de São Paulo, l’Etat qui produit le plus de sucre et d’éthanol du Brésil.
Traditionnellement les chaumes de la plante Saccharum officinarum étaient brûlés pour faciliter le travail des coupeurs de cannes. Maintenant ils restent sur le sol, ils le fertilisent, conservent son humidité et évitent l’érosion.
“ Ce résidu végétal laisse sur chaque hectare 45 kg de potassium ”, dit l’agronome Gustavo Nogueira, technicien de l’Association des Planteurs de Canne de l’Ouest de l’Etat de São Paulo. Les producteurs sont contraints d’en finir avec les “ brûlis ” d’ici 2014 ; dans les plaines de cette région, la mécanisation atteint déjà 70% de la monoculture. La législation concède une tolérance qui va jusqu’en 2017 pour les terres dont la pente est supérieure à 12 %, et où il n’est pas possible de récolter avec les machines actuelles.
Sur les sites où la récolte mécanique a débuté il y a quelques années, il y a des “ cañaverales ” (champs de cannes) productives pour sept ou huit ans, alors que la durée habituelle est de cinq ans. ”Le chaume récupère la microflore du sol et peut prolonger jusqu’à 12 ou 15 ans la durée de vie de la canne, un résultat fantastique ! ” Beaucoup d’agriculteurs profitent de la “ réforme ” annuelle de leurs cañaverales sur environ un cinquième de leurs terres, pour planter des arachides ou du soja après éradication de la vieille canne et avant de planter la nouvelle. Et cela fertilise leurs terres : ces oléagineuses fixent dans le sol l’azote qu’elles captent dans l’air.
En conséquence, le nord-est de São Paulo produit 80 % de l’arachide brésilien.
La production nationale a été multipliée par 7 depuis 1975, quand le gouvernement a décidé d’obtenir de l’alcool-carburant pour une raison économique – réduire les onéreuses importations de pétrole – mais son grand effet fut environnemental.
L’éthanol mélangé à l’essence élimine le plomb de ce combustible dérivé du pétrole, et cela améliore la qualité de l’air dans les grandes villes. “ Sans l’alcool, São Paulo suffoquerait dans la pollution ” déclare Gustavo.
Mais Manoel, président de “ l’Asociación Cultural Ecológica Pau Brésil ” considère comme un désastre la monoculture exclusive de canne dans la région de Ribeirão Preto, qui comprend 85 municipios, 3 millions d’habitants et 50 centrales sucrières avec fabriques d’éthanol. Avant que s’implante le Programme National de l’Alcool en 1975, les forêts couvraient 25 % de cette région. “ Maintenant elles n’en couvrent plus que 4 %, ce qui altère le régime des pluies, réduit l’humidité et accroit la chaleur ” souligne Manoel qui se consacre au commerce du miel qu’il exporte surtout vers l’Asie.
Manoel doit chercher du miel dans d’autres Etats, car “ la canne a étouffé la production locale en expulsant les abeilles. La région qui avait été grande productrice d’aliments divers, est devenue “ importatrice ” de riz, de haricots, de lait, de café et de légumes. La canne a provoqué une “ réforme agraire à l’envers ”, avec une inquiétante concentration de la terre pour quelques-uns et l’exclusion des petits propriétaires. ”
Par ailleurs, la nappe phréatique régionale et l’Aquifère Guarani qui fournit l’eau de nombreuses villes sont menacés par les filtrations d’agrotoxiques et de vinasse, un liquide foncé, principal résidu de la distillation de l’alcool. Les autorités qui gèrent les problèmes d’environnement ont bien signalé des “ eaux polluées ” mais ces délits restent impunis par la “ connivence ” des organes officiels. En outre, les brûlis continuent et risquent d’affecter la santé publique par les dépôts de suie.
La vinasse avait exterminé les poissons dans les cours d’eau de la zone de São Paulo et d’autres zones productrices, en intensifiant la production d’éthanol. Chaque litre d’éthanol génère 10 litres de résidu, et les déversements dans les cours d’eau étaient fréquents.
Mais comme la vinasse est riche en potassium et autres nutriments, on l’a utilisée pour fertiliser les cañaverales. C’est un sous-produit précieux qui peut avoir d’autres utilisations, comme multiplicateur d’algues pour produire du biodiesel ou comme base de fertilisants après une déshydratation partielle ou l’extraction du potassium.
A présent, les cours d’eau locaux donnent des poissons car il y a longtemps qu’ils ne reçoivent plus de vinasse. Le Dr Borges, médecin qui assiste les employés de l’usine Santo Antonio à Sertãozinho, à 20km de Ribeirão Preto, est apprécié pour avoir réussi à réduire drastiquement la mortalité infantile à Barrinha, la ville la plus pauvre de la région, et pour avoir réussi la rééducation de nombreux travailleurs handicapés par des accidents ou des maladies du travail dans l’industrie sucrière. Il ne croit pas que la “ suie ” des brûlis présente un danger : “ Ce sont des particules trop grandes pour arriver aux poumons, explique-t-il, et même la fumée dure peu de temps, comme celle d’un feu de paille. ”
La canne a “ une génétique qui tolère les maladies ” et exige moins de pesticides que d’autres cultures comme le coton ou le soja. En outre, des recherches actives ont développé des variétés plus résistantes et le contrôle biologique des insectes. La canne “ refertilise ” la terre, qui n’a besoin que de peu de suppléments chimiques pour assurer la production indéfiniment, comme dans certaines cañaverales du Brésil qui connaissent une nouvelle augmentation du rendement. On y cultive aussi des engrais verts pour nourrir la terre et on reboise tout l’espace possible.
Laisser un commentaire