(Source : NOTICIAS ALIADAS, ( 20 / 06 / 2014 )
La persistante discrimination dans les hôpitaux envers les femmes indigènes et /ou aux faibles ressources.
Antonia Blas est une indigène otomi qui vit dans la ville de Mexico. Alors qu’elle était dans le service des urgences et sur le point d’accoucher, on lui a refusé l’accès aux salles d’accouchement en affirmant qu’elles étaient saturées. Antonia a accouché dans les toilettes de l’hôpital San Gregorio Salas, accompagnée de son époux.
Cette discrimination n’est pas un cas isolé. Fin 2013, un autre cas retentissant : Irma López, une indigène mazateca accouchait aux abords d’un hôpital du sud de l’Oaxaca parce qu’une infirmière lui avait refusé l’accès aux soins dans l’hôpital. L’image de la jeune femme accroupie dans l’herbe avec son bébé encore relié à elle par le cordon ombilical circula sur les réseaux sociaux, suscitant l’indignation et aussi la révélation de plusieurs cas semblables.
Selon le Réseau pour les Droits Sexuels et Reproductifs du Mexique (DDESER), dans le département d’Oaxaca 80 % des femmes indigènes et rurales sont soumises par le personnel médical à des traitements discriminatoires durant l’accouchement et le contrôle de la grossesse.
Même si au cours des dernières années la planification familiale a réussi quelques avancées au Mexique, des organisations sociales ont dénoncé la persistante discrimination dans l’accès aux services de santé reproductive pour les femmes indigènes et aux ressources limitées. Selon l’Enquête Nationale de Santé et Nutrition de 2012, 53,1 % des femmes indigènes interrogées ont dit avoir utilisé un contraceptif dans leur dernière relation sexuelle, pourcentage qui est de 63,9 % chez les femmes résidant en zone urbaine.
Stérilisations.
Dans le sud du Chiapas, où environ 30 % de la population est indigène, une étude intitulée « Expérience de Fiscalisation de l’Accès, de l’Approvisionnement et de l’Utilisation des moyens contraceptifs (2007-2010) », publiée en 2011 par le DDESER et l’Organisation Non Gouvernementale (ONG) « Equité de Genre » révèle que la méthode la plus utilisée parmi les femmes (49 % des femmes interrogées pour cette étude) est la ligature des trompes, tandis que seulement 5 % utilisent la pilule contraceptive et 19 % le condom.
« Au Chiapas la ligature des trompes est pratiquée sous la pression ou par tromperie, surtout pour les femmes indigènes ou de zones rurales, sans leur expliquer en détails en quoi consiste l’opération, et sans leur offrir le moindre suivi médical », dénonce Nancy Zárate, professeur de psychologie du genre à l’Université Autonome du Chiapas (UNACH), et ex-coordinatrice de la DDESER. Selon elle, l’Etat mexicain n’a pas une politique intégrale dans la promotion des droits sexuels et reproductifs, car il n’existe pas de stratégie d’action qui implique les institutions à différents niveaux.
« Dans les années 70 eut lieu la dernière campagne systématique et effective au niveau national quant aux soins de la reproduction. C’était une exigence de la Banque Mondiale et le taux de natalité diminua effectivement », explique Nancy. « Durant le gouvernement de Ernesto Zedillo, (1994-2000) du Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI) on parvint à faire entrer dans les livres scolaires le thème du VIH/SIDA et des contraceptifs. Mais quand arriva le gouvernement du PAN (Parti d’Action Nationale), avec Vicente Fox (2000-2006) dès 2000 toutes ces informations furent supprimées des livres scolaires. »
L’étude du DDESER et Equité de Genre soutient que dans les hôpitaux publics de sept Etats du Pays qui devraient fournir les contraceptifs gratuitement, la consultation médicale était payante, le nombre de pilules contraceptives n’était pas suffisant, la bureaucratie pour les obtenir était excessive, le personnel était peu formé et les adolescentes devaient être accompagnées bien qu’il n’existe pas de loi qui les y oblige.
Grossesses d’adolescentes.
L’absence de stratégie institutionnelle intégrale dans la promotion des droits sexuels et reproductifs est l’un des facteurs qui, en 2008, mit le Mexique au premier rang pour les grossesses d’adolescentes parmi les pays de l’OCDE (Organisation pour la Coopération et le Développement Economique) : 64,2 pour mille naissances. Selon le rapport « Etat de la Population Mondiale 2013; maternité durant l’Enfance », du Fond de la Population pour les Nations Unies, (UNFPA), « les grossesses adolescentes sont plus probables chez des filles de foyers aux moyens précaires, avec un faible niveau éducatif et vivant dans des zones rurales. » Effectivement, au Mexique les Etats qui présentent les niveaux les plus élevés de grossesses adolescentes sont les plus pauvres, comme le Chiapas, le Guerrero, Oaxaca et Puebla.
Un autre élément qui détermine le taux élevé de natalité chez les adolescentes mexicaines est l’impossibilité de pratiquer légalement un avortement sûr, option qui n’est possible que dans le district fédéral.
« Ici il existe une loi datant de 2007 qui dépénalise l’avortement jusqu’à la 12ème semaine de grossesse, quand la mère le fait de manière volontaire, même sans cause spéciale. L’avortement est pratiqué dans les hôpitaux publics, les cliniques privées et les organisations civiles sans but lucratif », explique Carmen González, gérante d’un réseau de cliniques qui proposent des traitements contraceptifs et l’accès à des avortements en sécurité.
« Nous avons des sièges dans d’autres Etats, comme le Chiapas, où l’avortement est permis seulement si la mère a été violée, si sa vie ou celle de l’enfant est en danger, et s’il existe des malformations congénitales », ajoute-t-elle. « Là-bas nous travaillons pour la prévention de la grossesse non désirée et des infections à transmission sexuelle. On donne aux femmes enceintes des conseils pour qu’elles prennent la décision qui leur convient le mieux. Si elles décident d’interrompre leur grossesse, nous avons des accords avec d’autres organisations comme le Fondo María, qui soutient financièrement leur voyage jusqu’au district fédéral, où on leur offre la possibilité d’interrompre leur grossesse « .
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