(Revue ENVIO, août et septembre 2014 )
Le Canal Interocéanique.
Le chef de l’entreprise HKND, le Chinois Wang Jing avait reçu du Président Ortega en juin 2013 la concession pour la construction du Canal Interocéanique. Le 5 juin dernier, la page web de l’entreprise annonçait d’autres sous-projets, outre les huit déjà inclus dans la concession reçue (deux aéroports, deux ports, un oléoduc, une voie ferrée, deux zones de libre commerce). HKND informait qu’elle a supprimé l’un des deux aéroports et ajouté d’autres sous-projets : des centres de vacances, une centrale électrique, des fabriques de ciment et d’acier ainsi que « d’autres installations » garantissant que le Canal puisse être prêt dans cinq ans. Cette information conduit à penser qu’avec « l’excuse » du Canal – qui ne se construira pas – ce seront tous ces sous-projets qui seront réalisés, en bénéficiant des privilèges établis pour la concession du Canal, notamment aucun impôt à payer, ni loi pénale ni loi du travail à respecter. Un paragraphe de l’article 2 de la concession ouvre la porte à tout autre projet que celui du Canal…
Les municipalités concernées.
L’entreprise chinoise HKND informe que sur les 278 km de long du futur Canal, 105 km seront affectés par la tranchée de 520 m de large et 30 m de profondeur qui sera ouverte dans le lac Cocibolca. Pour faire cette tranchée, il faudra d’abord sortir mille millions de tonnes de sédiments accumulés au fond du lac. Le Canal aura une frange de 10 km au Nord et autant au sud, qui seront propriétés privées de l’entreprise concessionnaire. Dans cette frange de terre, des milliers de propriétés de petits, moyens et grands producteurs seront expropriées. Le Centro Humboldt, – préoccupé par tout ce qui concerne l’environnement -, a calculé qu’environ 282 communautés de différentes tailles seraient affectées directement par le Canal et bien d’autres de manière indirecte. Vu la dispersion de l’habitat, il est impossible actuellement de chiffrer le nombre de familles concernées.
Le Canal encore… Histoire d’explosifs.…
Tian Je, chef des travaux de l’entrepise chinoise HKND, a annoncé la construction au Nicaragua d’une fabrique d’explosifs pour disposer de un million deux cent mille tonnes de dynamite avec lesquelles briser les montagnes sur la route du futur Canal et aussi dynamiter le lit de basalte du lac Cocibolca, à travers lequel passera ce Canal. En effet, le lac doit atteindre une profondeur de 30 m au moins, afin que puissent y circuler les gigantesques navires qui le traverseront. Au fond du lac Cocibolca se trouve une « cordillère » de laquelle émergent des îles d’origine volcanique : Ometepe, Zapatera, Solentiname. Les conséquences de ce dynamitage du lit du lac sont imprévisibles…
Sécheresse sévère.
Le Corridor Sec du Nicaragua qui fait partie du Corridor Sec d’Amérique Centrale, affronte cette année une sécheresse agressive. Dans les municipios de cette zone la première récolte de maïs et de frijol est perdue. Des milliers de têtes de bétail ont péri par manque de nourriture et d’eau. On évalue à environ huit cent mille le nombre de bovins dans un état critique… Le mois d’août faisait craindre une pénurie alimentaire.
Migrations.
La migration Panaméenne avait enregistré, en 2013, 40 183 entrées de Nicaraguayens en recherche de travail. Le Consulat du Costa Rica à Managua a reçu, entre décembre 2013 et juillet 2014, des demandes de visas de neuf mille Nicaraguayens.
La violence toujours présente.…
La célébration du 19 juillet, 35e anniversaire de la Révolution Sandiniste, fut précédée d’enthousiastes annonces d’un futur prometteur avec la construction du Canal Interocéanique, présentée comme un remède à la pauvreté, au chômage, etc.… Au retour des bus dans les villages, cette liesse fut gâchée par un attentat criminel dans lequel quatre personnes trouvèrent la mort non loin d’Estelí. Les auteurs du crime s’étaient réunis à Ciudad Darío pour préparer leur méfait, qui apparait comme une vengeance à l’égard du pouvoir actuel. Lors des dernières municipales, l’élection dans cette ville d’un maire d’opposition avait été contestée puis empêchée, en imposant un élu du Front Sandiniste…
Féminicidios (assassinats de femmes).
Au cours des six premiers mois de 2014, 49 femmes furent assassinées, en moyenne deux par semaine. Les criminels sont généralement les conjoints ou les anciens compagnons des femmes. La majorité des victimes avait moins de 40 ans. Ces crimes sont caractérisés par l’acharnement sur la victime.
Les organisations de femmes réclament que la Loi 779 (sur les violences faites aux femmes) qui date de deux ans, soit enfin appliquée avec un budget suffisant pour garantir des politiques publiques efficaces, qui aborderaient le problème culturel, ces assassinats traduisant une expression maximale de la mysoginie caractérisant la culture machiste.
Elles demandent également que tous les orphelins laissés par ces crimes soient pris en charge par l’Etat, et informent que dans 60 % des cas, les mères ont été assassinées devant leurs enfants.
L’Institut de Médecine Légale informe de son côté que 80 % des dénonciations d’abus sexuel qui lui parviennent proviennent de filles de moins de 18 ans.
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