CHILI – Michelle Bachelet affronte une crise de confiance

(article de Noticias Aliadas – 25/05/2015 – Trad. B. Fieux)

Les mobilisations estudiantines et les accusations de corruption provoquent l’écroulement de popularité de la mandataire.

Une journée de protestations d’étudiants dans tout le pays le 14 mai est endeuillée par la violence civile qui a coûté la vie à deux étudiants à Valparaiso. C’est un autre jeune qui a tiré sur eux, prétextant qu’ils endommageaient sa propriété. Etudiants, professeurs et travailleurs de l’Education réclament des changements significatifs dans les projets de réformes éducatives du gouvernement Bachelet.

« Nous comprenons que ce fait n’est pas un cas isolé mais la conséquence d’un modèle social qui place l’individuel au-dessus du collectif, et plaçant même la propriété privée avant la vie des personnes », signale la Fédération d’Etudiants de l’Université du Chili  (FECH). « En tant qu’étudiants c’est notre devoir de ne pas baisser les bras dans la recherche d’une réforme qui consacre l’éducation comme un droit au service des majorités du pays et non de l’intérêt de quelques-uns. »

La Présidente se prononça immédiatement sur les faits en les qualifiant « d’irrationnels  » et « d’injustifiés ». Mais la pression des étudiants fit de l’effet. La mandataire annonça le 21 mai la gratuité de l’éducation supérieure pour les étudiants les plus pauvres.

Dans un message au pays, la mandataire déclara : « en avançant dans notre engagement d’atteindre la gratuité pour les 70 % des étudiants les plus vulnérables du Chili à la fin de mon mandat (2018), à partir de 2016 nous assurerons que les 60 % les plus vulnérables qui étudient dans les centres de formation technique et les instituts professionnels accrédités ou ceux qui suivent les cours des universités du Conseil des Recteurs, accèdent à la gratuité complète et effective, sans besoin de bourse ni crédit. Ceci bénéficiera à presque 264 000 jeunes ».

Les manifestations d’étudiants ne sont pas une nouveauté au Chili. En 2006, des protestations massives contre l’absence d’éducation gratuite  au Chili, organisées par des groupes d’étudiants, furent un grand défi pour le premier gouvernement de Bachelet (2006-2010).

Les réclamations estudiantines obtinrent quelques concessions  et réformes de la part des autorités d’alors, incluant l’approbation de la Loi Générale de l’Education en remplacement de la Loi d’Enseignement, et la création d’une super-intendance de l’éducation pour superviser la qualité des écoles.

En 2011, durant la présidence de Sebastián Piñera, (2010-2014), à nouveau les étudiants envahirent toutes les rues du pays en réclamant une éducation publique de qualité et la fin du système éducatif lucratif. Le gouvernement de Piñera n’impulsa aucune réforme éducative et termina son mandat avec un faible pourcentage d’approbation.

Michelle Bachelet a terminé en mars la première année de son second mandat et parmi ses réalisations on peut citer la création du Ministère de la Femme et de l’Equité de Genre, la modification du système électoral et l’approbation de la réforme fiscale.

Selon la fondation non gouvernementale Ciudadano Inteligente, 16,4 % de ses promesses de campagne ont été accomplies durant sa première année de gouvernement. Cependant la mandataire a encore en attente d’autres réformes dans des secteurs importants comme la santé, le travail, le handicap, la culture.

Les mobilisations estudiantines se produisent dans le contexte de la crise de confiance que Michelle Bachelet est en train d’affronter. Dans une tentative pour remonter la désapprobation de sa gestion,  – qui  atteignait 56 % – , le onze mai la Présidente changea une grande partie de son cabinet.

Selon elle, « il faut mettre des énergies renouvelées et des visages nouveaux face aux tâches à accomplir ».

La coalition Nueva Mayoría (Nouvelle Majorité) – qui inclut les partis de la Concertation Démocratique (Démocrate Chrétien, Pour la Démocratie, Radical social-démocrate, Parti Socialiste) qui gouverna le Chili entre 1990 et 2010, à laquelle se joignirent le Parti Communiste, La Gauche Citoyenne et le Vaste Mouvement Social – a été accusée d’être impliquée dans un trafic d’influences. Sebastián Dávalos, fils de la Présidente Bachelet, est accusé d’utiliser de l’information privilégiée pour obtenir un prêt de dix millions de dollars US pour un projet immobilier de propriété de son épouse.

« C’est grave, parce que cela nuit à notre démocratie et cela crée des abus, des privilèges et de l’inégalité » avertit Michelle Bachelet dans un message public.

De même, début mars des déclarations furent filtrées à la presse : elles mettaient en évidence des relations étroites entre des hommes politiques du parti de droite UDI (Union Démocratique Indépendante) et d’importantes entreprises, qui révélaient une évasion d’impôts pour financer illégalement ledit parti.

Du fait de ces accusations, le gouvernement décida d’accélérer une série de mesures destinées à combattre la corruption,  comme l’élimination de souscriptions anonymes. Il a également prévu une réforme quant à la réglementation  des campagnes électorales, qui aiderait à réguler la relation entre entreprises privées et charges publiques.

Bachelet annonce aussi qu’en septembre débutera le processus pour élaborer une nouvelle Constitution qui remplacera l’actuelle approuvée en 1980 durant la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990).

En attendant, les manifestations continuent dans tout le pays, s’opposant à une forte répression qui a déjà fait de nombreux blessés et détenus.

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