(Salim Lamrani, Rebelión, 02/09/2015 – Traduction Bernadette Fieux)
Dès 1959 les nouvelles autorités conduites par Fidel Castro ont placé les défavorisés, surtout les femmes et les personnes de couleur, – principales victimes des discriminations inhérentes à une société patriarcale et ségrégationniste -, au centre du projet réformateur. C’était la Révolution « des humbles, par les humbles et pour les humbles. »
1. Les femmes avant le triomphe de la Révolution.
Sous le régime militaire de Fulgencio Batista, de 1952 à 1958, la femme cubaine ne représentait que 17 % de la population active. Femme au foyer, soumise à la toute puissance du mari, première victime de l’analphabétisme qui accablait 800 000 personnes dont la moitié était des femmes. Malgré l’obtention du droit de vote en 1934, le rôle des femmes dans la vie politique était bien réduit.
Mais les femmes cubaines jouèrent un rôle clé dans la lutte insurrectionnelle contre la dictature de Batista, elles participèrent à la guerre et créèrent en 1958 un peloton exclusivement féminin dans la Sierra Maestra. Cependant les revendications de ces militantes n’étaient pas exclusivement féministes : » nous ne luttons pas que pour les droits des femmes, nous luttons pour ce qui bénéficie à tous ».
2. Les mesures du gouvernement révolutionnaire.
La femme cubaine fut la principale bénéficiaire des conquêtes sociales et populaires. En 1960, Vilma Espín fonda la Fédération des Femmes Cubaines (FMC) afin de défendre les mêmes droits pour tous et de mettre fin aux discriminations. Actuellement la FMC compte plus de 4 millions de membres. Par la suite Vilma Espín consacra sa vie aux luttes des femmes cubaines pour l’égalité, jusqu’à son décès en 2007 : Commission Nationale de Prévention, Commission pour l’Enfance, la Jeunesse, Egalité des Femmes au Parlement Cubain.
L’une des premières tâches de la FMC fut de lutter contre la prostitution, – nécessité vitale pour plus de cent mille femmes dans la Cuba pré-révolutionnaire -,et d’impliquer ces femmes dans la construction de la nouvelle société. Quand les conditions économiques et sociales responsables de l’exploitation sexuelle des femmes disparurent, leur réadaptation sociale fut facilitée par l’existence d’une structure fédérative féminine.
« Etre instruit pour être libre, « disait José Marti. En 1961 Cuba lança une grande campagne d’alphabétisation qui permit à tous les secteurs de la société, et surtout aux femmes de couleur, de bénéficier de ce progrès social qui ouvrait la voie à l’égalité. Dix mille écoles primaires furent créées, et en douze mois, 700 000 personnes furent alphabétisées. 55% étaient des femmes. En 1961, l’UNESCO déclara Cuba « premier territoire libre d’analphabétisme », fait unique en Amérique Latine à cette époque.
Puis le gouvernement élabora un arsenal législatif destiné à l’égalité de droits entre hommes et femmes et à l’égalité pour tous. Les articles 41 et 42 de la Constitution pénalisent toutes les discriminations portant atteinte à la dignité humaine. Les femmes ont alors accès à toutes les charges publiques et tous les grades des forces armées.
Sur le plan international, Cuba joua un rôle d’avant garde dans la promotion des droits des femmes. Ainsi cette île des Caraïbes fut le premier pays d’Amérique Latine à légaliser l’avortement en 1965.La Guyane en 1995 et l’Uruguay en 2012 suivirent son exemple. De même, Cuba fut le premier pays du monde à signer la Convention sur l’Elimination de toutes les Formes de Discrimination, et le second à la ratifier.
3. La femme cubaine aujourd’hui.
Depuis l’avènement de la Révolution Cubaine, la santé et le bien-être de la femme ont été érigés en priorités nationales. L’espérance de vie des femmes est de 80 ans, comme dans les nations les plus développées.Le taux de mortalité infantile est de 4,6 pour mille, le plus bas du continent américain, et du Tiers Monde. Le taux de mortalité maternelle est de 0,02 %, le plus bas d’Amérique Latine.
Le Code du Travail, dans son article 59, protège les femmes cubaines. Les mères ont la possibilité de s’occuper totalement du nouveau-né et de percevoir en même temps leur salaire intégral un mois et demi avant la naissance et trois mois après. Ensuite la mère dispose d’un an de congé avec 60 % de son salaire. Au bout d’un an elle retrouve automatiquement son poste. La femme cubaine peut prétendre à la retraite après avoir cotisé 30 ans.
Les femmes représentent 60 % des étudiants du pays et plus de 65 % d’entre elles sont diplômées de l’enseignement supérieur. Sur les 5,5 millions de personnes qui composent la population active du pays, 66,4 % des techniciens et professionnels de niveau moyen et supérieur sont des femmes ainsi que 66% des fonctionnaires civils. La législation cubaine impose que le salaire de la femme soit exactement le même que celui de l’homme pour le même travail.
A Cuba les femmes occupent 46 % des postes de direction dans le secteur économique.
Elles sont pleinement intégrées dans la vie politique du pays. Au Parlement cubain, 48,66 % des députés sont des femmes. Dans le domaine diplomatique, ce sont des femmes qui représentent Cuba dans 47 pays. Les négociations avec Washington concernant la normalisation des relations bilatérales des Etats-Unis avec Cuba sont confiées à Josefina Vida, Directrice du Département des Etats-Unis dans le MINREX.
La pratique des sports, indispensable au développement physique et intellectuel des citoyens, est gratuite dans toutes les infrastructures du pays. Les résultats sont brillants et Cuba remporte le nombre le plus élevé de médailles olympiques féminines avec 49 titres.
Cuba dispose de tout un arsenal législatif dissuasif contre la violence de genre. Le Code Pénal sanctionne sévèrement toute atteinte à l’intégrité physique et psychologique et la violence conjugale est considérée comme facteur aggravant.
Bien que les comportements machistes, sexistes et discriminatoires, hérités de cinq siècles de société patriarcale, existent encore et constituent un obstacle à la pleine émancipation de la femme, celle-ci joue indubitablement un rôle prépondérant dans la société et contribue largement à l’édification d’une société basée sur l’égalité et la justice sociale.
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