(Adital, septembre 2015 – Trad. B. Fieux)
Sara Oviedo, Docteur en Sociologie et Sciences Politiques, membre du Comité des Droits de l’Enfant, est préoccupée par les différentes formes de violences dont sont victimes les enfants, garçons et filles, en Colombie. Chaque jour, dans le pays, trois enfants trouvent la mort par une forme de violence : violence sexuelle, violence domestique, violence du conflit armé, recrutement d’enfants, garçons et filles. « L’ONU considère que le principal problème ce sont les violences, au pluriel, dans le milieu familial, dans les rues, dans les communautés », souligne-t-elle.
Dans la seule année 2014, 119 enfants ont été victimes du recrutement illégal dans le contexte du conflit armé colombien. Ce qui favorise les violences, c’est en premier lieu, le fait que les institutions ne voient pas la problématique dans sa totalité parce qu’elles n’ont pas l’information suffisante, et en second lieu, l’impunité. « En Colombie le conflit armé a fait de la violence une chose naturelle », constate Sara.
De nombreuses organisations militent pour une meilleure information de la population. Elles agissent pour que l’engagement du pays à en finir avec la guerre interne signifie également une volonté de protéger les enfants de ce type de violence. « La paix ne signifie pas simplement la fin de la guerre, c’est la possibilité de penser à une Colombie nouvelle dans laquelle on établit des pactes comme à Cuba, mais en relation avec les enfants », explique Sara.
De 1999 au 31 décembre 2014, 5694 enfants et adolescents repris aux groupes armés illégaux ont été pris en charge par l’ICBF (Institut colombien du bien-être familial). De plus, en 2014, 55 937 jeunes ont été victimes de déplacement, c’est-à-dire que chaque jour 153 personnes mineures ont été éloignées de leur école, de leurs amis, de leur famille et de leur communauté.
Sara Oviedo dénonce le fait que certains jeunes recrutés par la BACRIM* sont traités comme des criminels et non comme des victimes, et de ce fait ils ne peuvent pas être inclus dans le programme ICBF pour mineurs démobilisés, au contraire on ouvre contre eux des processus judiciaires en les désignant comme coupables.
Sur ce point l’ONU recommande au gouvernement colombien de « joindre tous ses efforts pour assurer la démobilisation et la réintégration effectives des mineurs recrutés, qu’ils aient été ou non utilisés dans les hostilités ».
*BACRIM : groupes armés qui luttent pour avoir le contrôle du trafic de drogue.
Enfants et exploitation sexuelle commerciale.
L’exploitation sexuelle commerciale des enfants, garçons et filles, et des adolescents, est un problème mondial reconnu par 159 pays. « Niños, niñas y adolescentes » sont désignés par le sigle NNA. Ils sont de plus en plus victimes d’exploitation sexuelle, et à des âges de plus en plus précoces.
La Colombie souffre des conséquences du conflit armé et des déplacements forcés depuis plus de 50 années. Dans ce pays on estime à plus de 35 000 le nombre de NNA, dont 75 % sont des filles. Leur nombre a augmenté dans le contexte actuel : le conflit armé, certes, mais aussi la pauvreté, le manque de travail, et le tourisme national et international. Les recherches effectuées en lien avec l’ICBF ont permis de découvrir l’existence d’une série de réseaux autour des victimes, assumant le rôle de complices ou d’intermédiaires pour entretenir cette pratique.
L’aide à l’enfance maltraitée consiste à adopter une culture protectrice de l’enfance et de l’adolescence et à lutter pour obtenir la justice et vaincre l’impunité : promouvoir la dénonciation des faits délictueux, prodiguer des soins aux victimes et avoir une incidence dans les politiques publiques, encourager les mesures de type législatif en faveur des victimes. Ce genre de délits est très fréquemment couvert par l’impunité. Il faut des actions concertées de nombreuses organisations de protection de l’enfance et pouvoir travailler en étroite collaboration avec le système juridique.
Des organisations telles que « Terre des Hommes-Espagne » travaillent en agissant sur plusieurs points :
- assurer protection et assistance psycho-juridique aux jeunes victimes d’exploitation sexuelle,
- accompagner les fonctionnaires publics responsables de cette assistance,
- intervenir dans les institutions publiques nationales et les organisations internationales afin qu’elles adoptent des mesures permettant d’améliorer leurs interventions en matière de lutte contre ce type de délits,
- agir en prévention par des initiatives d’informations.
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