(Adital, 04/04/2016 – Trad. B.Fieux)
278 km de long, deux ports, un chemin de fer, un oléoduc et un aéroport. L’envergure du projet pour la construction du Grand Canal Interocéanique du Nicaragua, presque trois fois plus grand que le Canal de Panama, est impressionnante. Cependant c’est dans la même proportion que seront les impacts environnementaux : ils vont affecter sept zones protégées, détruire 193 mille hectares de sites champêtres, menacer le Grand Lac Cocibolca – le réservoir d’eau douce le plus important d’Amérique Centrale -, sans oublier la population du Territoire Rama et Krio, sur la Côte Atlantique du Nicaragua.
Le projet, annoncé en 2013, va se réaliser sans informer les communautés et divisera le pays en deux, pour relier les océans Atlantique et Pacifique. Sa construction sera à la charge de l’entreprise chinoise d’investissements Hong Kong Nicaragua Canal Développement (HKND).
Bien que l’entreprise ait déjà remis l’étude des impacts écologiques et sociaux au gouvernement du pays, les communautés se plaignent de ne pas avoir été consultées sur la construction, ni informées sur les impacts que ce chantier aura sur leurs vies. En majorité, la population de la région où passera la Canal dépend de l’agriculture, de la chasse et de la pêche pour sa subsistance.
Selon Amnesty International, une information récente précise que plus de 50 % de la voie du Canal affectera les communautés indigènes et afrodescendantes du Territoire Rama et Krio. « C’est indigne que le Nicaragua se propose de poursuivre un mégaprojet qui va détruire la vie de nombreuses communautés sans tenir compte de leur opinion », affirme Erika Guevara, directrice du Programme d’Amnesty International pour l’Amérique, qui critique aussi le fait que les autorités attachent plus d’importance à l’argent qu’aux droits humains fondamentaux des personnes.
En mars 2015, des organisations sociales et le Centre pour la Justice et le Droit International (CEJIL), de l’OEA (Organisation des Etats Américains), ont dénoncé des violations des droits humains dans le processus de construction du canal interocéanique. « La concession du canal, qui inclut plus de dix mégaprojets, a été assignée à un seul pourvoyeur, auquel on a accordé les droits exclusifs de développement et d’opération potentielles pour plus de 116 ans » a signalé Luis Carlos Buob, avocat du CEGIL.
A cette occasion, l’avocat a dénoncé aussi l’approbation du projet de loi du canal faite à la hâte, caractérisée par la désinformation, le manque d’analyse, l’absence de consultation publique, et la violation de la souveraineté nationale.
La présidente de l’association Caritas du Nicaragua et l’évêque de Jinotega, Mgr Enrique Herrera, signalent dans une interview avec Adital, que le projet « n’a pas de fondements suffisants pour obtenir la confiance de la population », et que l’un des rares bénéfices de ce projet serait d’éventuels nouveaux emplois pour la population. Pour Mgr Herrera, il est important que le peuple affecté exprime son désaccord. « Nous ne pouvons pas être un peuple qui accepte tout sans faire usage de ses droits. Mais il est triste de voir avec quelle violence le droit d’expression est si fréquemment malmené ».
En accord avec l’homme d’Eglise, l’impact sur la population affectée va bien au-delà du déplacement de leurs propriétés et de leurs terres. il signifie : « les arracher à leurs traditions et à la culture paysanne enracinée dans notre peuple « .
Pour alerter les communautés du pays sur l’envergure des dommages causés à la nature, Caritas Nicaragua met au point un projet de conscientisation sur l’environnement à travers l’encyclique du Pape François, Laudato Si, qui a pour objectif de former les représentants de chaque communauté dans la lutte contre le grand chantier.
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