NICARAGUA – Les triomphes de Daniel Ortega

(Noticias Aliadas, 10/11/2016 – Trad. B. Fieux)

Le mandataire est réélu pour gouverner pour la 3ème fois consécutive, avec son épouse comme vice-présidente.

Avec plus de 72 % des votes, Daniel Ortega, 71 ans, s’est imposé dans les élections du 6 novembre. Ortega, accompagné de son épouse Rosario Murillo comme vice-présidente, entamera le 10 janvier 2017 son troisième mandat consécutif pour une période de 5 ans.

Outre le président, 90 députés furent élus à l’Assemblée Nationale et 20 représentants au Parlement Centro-américain.

Ortega, leader du Front Sandiniste de Libération Nationale (FSLN),  gouverna de 1979 à 1990, d’abord comme coordinateur de la Junte de Reconstruction Nationale après le triomphe de la Révolution Populaire Sandiniste le 19 juillet 1979, qui renversa le dictateur Anastasio Somoza (1967-79), et ensuite de 1985 à 1990. Il perdit alors les élections face à Violeta Barrios de Chamorro ( 1990-97)

Le FSLN, avec Ortega en tête, passa alors les 16 années suivantes dans l’opposition. Il  participa aux élections de 1996 et de 2002, battu d’abord par Arnoldo Alemán, (1997-2002) puis par Enrique Bolaños (2002-2007), tous deux du Parti Libéral Constitutionnaliste (PLC).

En 1999, Ortega et Alemán négocièrent un pacte pour se répartir les pouvoirs de l’Etat à égalité de conditions, l’institutionnalité du pays restant aux mains des sandinistes et des libéraux.

En 2006, Ortega gagna les présidentielles avec 38% des votes et dès 2009 il manifestait son intention de postuler encore deux ans après, mais la Constitution interdisait deux mandats consécutifs.

En octobre de cette année-là, Ortega présenta un recours dans lequel il signalait que l’article 147 de la Constitution qui interdisait la réélection, violait le droit à l’égalité inconditionnelle de tout citoyen nicaraguayen à exercer la fonction publique.

La Cour Suprême, contrôlée par le FSLN, déclara inapplicable ledit article, précisant que « c’est l’obligation de l’Etat d’éliminer les obstacles qui empêchent de fait l’égalité entre les Nicaraguayens et leur participation effective à la vie politique, économique et sociale du pays. »

En 2011, Ortega postula à nouveau grâce au jugement de la Cour Suprême et s’imposa avec 66% des votes, ce qui lui permit d’avoir le contrôle de l’Assemblée Nationale, avec 63 députés sur 92.

Trois ans plus tard, le Législatif approuvait une réforme constitutionnelle qui garantissait à Ortega la réélection indéfinie.

Contrôle absolu.

Ortega et Murillo célébrèrent leur triomphe dans des élections  sans observateurs internationaux.

« Nous voulons, en toute humilité, remercier toutes les familles nicaraguayennes qui, hier et aujourd’hui, ont dit oui à l’amour, oui à la vie, oui à la paix, oui à une nouvelle culture politique et oui à l’unité de tous, pour le bien de tous », exprimèrent-ils dans une déclaration.

L’opposition participa, représentée par le PLC qui obtint 15% des voix, suivi par l’Alliance Libérale Nicaraguayenne (4,7%°), le Parti Libéral Indépendant (PLI) avec 4,5%, le Parti Conservateur (2,3%) et l’Alliance pour la République (1,4%).

Le  triomphe d’Ortega était prévisible. Les enquêtes le donnaient comme vainqueur absolu, avec le résultat annoncé. Bien que le Conseil Suprême Electoral, sous contrôle du FSLN, assure que 57% des 4,3 millions d’électeurs se déplacèrent pour voter, l’opposition soutient que l’absentéisme atteignait 70%…

Le piètre zèle électoral de l’opposition, majoritairement de droite, est dû à son atomisation et à la décision de la Cour Suprême, en juin, de priver le PLI de sa représentation juridique et de la remettre à un secteur proche du FSLN. Ainsi, elle destitua les 28 législateurs qui faisaient partie de la Coalition Nationale pour la Démocratie – la seconde force de l’Assemblée Nationale qui incluait huit partis avec représentation parlementaire  – et qui ne se pliaient pas à la nouvelle direction du PLI.

Des secteurs de l’opposition qualifièrent ces élections de « farce ». Le Frente Amplio por la Democracia, espace de convergence des forces politiques et sociales qui luttent pour la reconstruction démocratique au Nicaragua, qui a animé une campagne invitant à ne pas voter, signala dans un communiqué que « ce qui a eu lieu aujourd’hui 6 novembre, était une farce électorale et une fraude constitutionnelle ».

« Daniel Ortega nous a imposé une régime autoritaire, dictatorial, de parti unique, avec une restriction croissante des droits citoyens et avec des fraudes électorales successives, au point d’en arriver à l’effondrement du système électoral, des partis politiques et du système institutionnel démocratique », dit le communiqué qui a convoqué les citoyens à « continuer à demander des élections véritables, plurielles, avec de nouvelles autorités électorales, avec une législation électorale démocratique, et avec  des droits citoyens réels et des observateurs nationaux et internationaux ».


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