Le Nicaragua est le pays d’Amérique Latine qui présente le plus de grossesses d’adolescentes. Au cours de la dernière décennie, 16400 filles mineures de moins de 14 ans ont accouché… Chiffre d’autant plus alarmant que ces grossesses sont la conséquence de viols. Le drame se complique devant l’inaction de l’Etat, qui par des lois rétrogrades impose la maternité à ces mineures au détriment de leur intérêt, comme le voudrait la Constitution.
Chaque année 1640 accouchements de fillettes, une moyenne de 4 par jour pour ce petit pays…Ce sont les données de l’Institut de Médecine Légale. Le Code Pénal du Nicaragua établit dans son article 168 que « quand la victime a moins de 14 ans, on doit présumer l’absence de consentement, donc le viol ». Les données de 2016 de Médecine Légale révèlent que, dans presque 80% des cas de fillettes violées, l’abuseur était un membre de la famille (père, beau-père, etc…) ou un autre homme de l’entourage familial. Au-delà de 14 ans, il s’agit souvent de relations sexuelles consenties entre adolescents qui n’utilisent pas de contraceptifs.
L’organisation IPAS se penche sur ce problème préoccupant et publie une enquête intitulée « Grossesse imposée par viol : fillettes de moins de 14 ans », qui à travers une quinzaine de cas de mineures, dresse un panorama sur l’abus sexuel et la maternité forcée dans ce pays. Selon ce document, la violence sous toutes ses formes, abus sexuel, viol, grossesse infantile, maternité imposée à cette étape de la vie, révèle un problème multidimensionnel : de santé, social, juridique et trop négligé.
« Il y a tant de cas de délits de violences sexuelles qu’on pourrait parler d’une épidémie-endémie non déclarée officiellement », assure cette enquête. Martha María Blandón, directrice de IPAS-Amérique Centrale, explique que les conséquences du viol sont nombreuses: lésions, atteinte prolongée à la santé mentale, infections de transmission sexuelle comme le VIH, et grossesse imposée. Et la mortalité maternelle est élevée chez ces êtres trop jeunes.
La plupart des filles avaient d’abord exprimé le désir de ne pas poursuivre leur grossesse, mais l’IVG n’est pas autorisée au Nicaragua, et personne ne leur avait proposé une adoption. L’Etat ne fait rien pour les aider. Il existe bien le MAI (Modèle d’Attention Intégrale aux victimes de violences de genre) mais il n’existe que sur le papier, et quand il faut revoir les autorités à plusieurs reprises, qui questionnent avec insistance pour tenter de prouver si c’est bien un viol… alors que l’agresseur n’est pas interrogé !
Dans bien des cas les victimes sont transférées dans un établissement dépendant du Ministère de la Famille, dont la logique est d’imposer la maternité. Dès qu’elles ont accouché, elles retournent dans leur famille, où vit leur agresseur… Les tests réalisés trahissent des indices de dépression, car les filles taisent leurs émotions et feignent d’accepter la réalité avec docilité, mais beaucoup expriment des idées suicidaires…
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