LES VOLCANS DU NICARAGUA

Le Nicaragua est un pays de cours d’eau et de volcans. On dénombre sur son territoire plus de 50 structures volcaniques, entre actives, inactives et éteintes. Huit volcans se manifestent encore parfois, de différentes façons.

Le volcanisme a été un facteur déterminant dans la configuration du relief nicaraguayen. Les sols d’origine volcanique recouvrent 70% de la superficie du pays et présentent une fertilité particulière. L’énergie géothermiques est encore peu exploitée.

Actuellement l’activité volcanique se réduit à quelques cratères dans l’ouest du pays, non loin de la côte Pacifique. Certains laissent échapper continuellement des fumerolles ou des laves comme le Masaya, d’autres entrent parfois en éruption, comme le Cerro Negro (675m) en 1992. Ce dernier, qui n’a que 170 années d’existence, a produit plus de 20 éruptions. Celle de 1992 dura 4 jours, avec des nuages de sable et de cendres, des bombes volcaniques et des émanations de gaz. Les cultures de coton furent détruites et bien des habitations endommagées.

Mais la « grande éruption » fut celle du volcan Cosigüina en 1835. Elle est connue comme la 2e en importance après le volcan Krakatoa (entre Java et Sumatra) au plan mondial. Situé face au golfe de Fonseca, le Cosigüina se dresse à 800m au dessus du niveau de la mer. Au fond de son gigantesque cratère de 2 km de diamètre, s’étend une lagune inaccessible. Le 20 janvier 1835 le volcan rejeta soudain quantité de cendres et de pierres ponces, obscurcissant le ciel pour plusieurs jours. Les cendres portées par le vent se déposèrent en couches épaisses à des lieux du volcan, certaines furent transportées jusqu’en Colombie et au Mexique, d’où on pouvait même entendre les détonations du volcan. A 250 km à la ronde, sur la mer flottaient des pierres ponces incandescentes…

Au bout de trois jours d’obscurité et de poussière asphyxiante, cette grande éruption fut considérée par la population croyante comme le moment du Jugement Dernier, et nombreux furent ceux qui accoururent chez le prêtre !.…

Aujourd’hui le Cosigüina est apaisé et tranquille.

Non loin du lac de Managua, le Momotombo (1280m), lui, est passé à la postérité grâce au poème de Victor Hugo…

LES RAISONS DU MOMOTOMBO
(Victor Hugo, « La légende des Siècles », 1859 )

Trouvant les tremblements de terre trop fréquents,
Les rois d’Espagne ont fait baptiser les volcans
Du royaume qu’ils ont en-dessous de la sphère ;
Les volcans n’ont rien dit et se sont laissé faire,
Et le Momotombo lui seul n’a pas voulu.
Plus d’un prêtre en surplis, par le saint-père élu,

Portant le sacrement que l’Église administre,
L’œil au ciel, a monté la montagne sinistre ;
Beaucoup y sont allés, pas un n’est revenu.

Ô vieux Momotombo, colosse chauve et nu,
Qui songe près des mers, et fais de ton cratère
Une tiare d’ombre et de flamme à la terre,
Pourquoi, lorsqu’à ton seuil terrible nous frappons,
Ne veux-tu pas du Dieu qu’on t’apporte ? Réponds.

La montagne interrompt son crachement de lave,
Et le Momotombo répond d’une voix grave :

« Je n’aimais pas beaucoup le dieu qu’on a chassé.
Cet avare cachait de l’or dans un fossé ;
Il mangeait de la chair humaine ; ses mâchoires
Étaient de pourriture et de sang toutes noires.
Son antre était un porche au farouche carreau,
Temple sépulcre orné d’un pontife bourreau ;

Des squelettes riaient sous ses pieds ; les écuelles
Où cet être buvait le meurtre étaient cruelles ;
Sourd, difforme, il avait des serpents au poignet ;
Toujours entre ses dents un cadavre saignait ;
Ce spectre noircissait le firmament sublime.
J’en grondais quelquefois au fond de mon abîme.

Aussi, quand sont venus, fiers sur les flots tremblants,
Et du côté d’où vient le jour, des hommes blancs,
Je les ai bien reçus, trouvant que c’était sage.
— L’âme a certainement la couleur du visage,
Disais-je ; l’homme blanc, c’est comme le ciel bleu ;
Et le dieu de ceux-ci doit être un très bon dieu.
On ne le verra point de meurtre se repaître. —
J’étais content ; j’avais horreur de l’ancien prêtre ;

Mais, quand j’ai vu comment travaille le nouveau,
Quand j’ai vu flamboyer, ciel juste ! à mon niveau !
Cette torche lugubre, âpre, jamais éteinte,
Sombre, que vous nommez l’Inquisition Sainte,
Quand j’ai pu voir comment Torquemada s’y prend
Pour dissiper la nuit du sauvage ignorant,
Comment il civilise, et de quelle manière
Le saint office enseigne et fait de la lumière,
Quand j’ai vu dans Lima d’affreux géants d’osier,
Pleins d’enfants, pétiller sur un large brasier,
Et le feu dévorer la vie, et les fumées
Se tordre sur les seins des femmes allumées,
Quand je me suis senti parfois presque étouffé
Par l’âcre odeur qui sort de votre autodafé,

Moi qui ne brûlais rien que l’ombre en ma fournaise,
J’ai pensé que j’avais eu tort d’être bien aise ;
J’ai regardé de près le dieu de l’étranger,
Et j’ai dit : — Ce n’est pas la peine de changer. »


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