Venezuela et Bolivie : la subversion silencieuse.
(Source : ALAI, article de Eva Golinger,
avocate et chercheuse sur le thème de l’ingérence des Etats-Unis en Amérique Latine)
Le gouvernement des Etats-Unis a perfectionné une méthode d’ingérence qui permet d’infiltrer tous les secteurs de la société civile dans un pays présentant des intérêts économiques et stratégiques.
Au Venezuela cette stratégie prend forme en 2002, avec le financement de secteurs d’opposition à Chávez par la NED ( National Endowment for Democracy) et l’ouverture d’un bureau de la USAID ( Aide des USA au Développement International ) à Caracas. Ces efforts réussissent à consolider un mouvement d’opposition qui, même s’il a échoué dans sa préparation d’un coup d’Etat, est parvenu à causer des dommages sérieux à l’industrie pétrolière et à l’économie nationale par son sabotage économique et la “ grève ” des chefs d’entreprises.
Puis, l’opposition s’étant divisée, cette stratégie se réoriente vers les communautés aux faibles ressources, les secteurs chavistes, la communication… Plus de 360 “ bourses ” ont été attribuées à des organisations sociales, des partis politiques, des communautés, dans le cadre d’un programme intitulé : “ Venezuela : initiatives pour la Construction de Confiance (VICC) ”. C’est à travers la DAI ( Development Alternatives) que l’ USAID finance les partis politiques d’opposition sous couvert “ d’assistance technique ”, avec la participation des partis politiques nord-américains (Institut Républicain Internationale, IRI, et Institut Démocrate International, IDI). Les programmes de la DAI concernent “ le dialogue politique, le débat public, la participation citoyenne et la formation de leaders démocratiques ”.
L’USAID finance aussi tout un réseau d’organisations à l’intérieur du pays, comme la PADF (Fondation du Développement Pan-Américain) dont l’objectif est “ d’appuyer la société civile ” et qui a appuyé financièrement 14 ONG venezueliennes depuis fin 2006.
Les derniers rapports publics de l’USAID mentionnent une conférence organisée en août 2007, avec 50 maires venezueliens pour traiter du thème de la “ décentralisation ” et des “ réseaux populaires ”. Le programme d’action au Venezuela promet de poursuivre les efforts pour “ renforcer la société civile et les partis politiques, promouvoir la décentralisation et les conseils municipaux, et conseiller les défenseurs des droits humains ”. Le Congrès états-unien a déjà approuvé des fonds pour ce bureau de l’USAID au Venezuela, ce qui laisse penser que la subversion continuera de menacer la révolution bolivarienne.
Mais le Venezuela n’est pas la seule cible de cette ingérence états-unienne à travers l’USAID et ses millions de dollars de financement aux opposants. En mars 2004 l’USAID ouvrait un bureau en Bolivie, dans le but affiché de “ réduire les tensions dans les zone de conflit social et appuyer le pays dans la préparation des prochaines élections ”. Ici l’USAID travaille en lien avec l’entreprise étas-unienne Casals-Associates, qui a déjà exécuté des programmes interventionnistes dans plus de 40 pays du monde. L’USAID concentre ses efforts sur la lutte contre l’Assemblée Constituante, le séparatisme des régions riches en ressources naturelles, comme Santa Cruz et Cochabamba. 13,3 millions de dollars ont été octroyés à 379 projets divers et organisations pour “ renforcer les gouvernements régionaux ”, avec l’intention d’affaiblir le gouvernement Morales, “ créer des liens entre les groupes indigènes et les structures démocratiques ”, “ diffuser l’information ”, “ renforcer l’éducation civique des leaders émergents ”, etc…
Les nobles thèmes de ces programmes indiquent que Washington tente de miner le pouvoir national d’ Evo Morales. Celui-ci a dénoncé publiquement la subversion exercée par l’USAID, avertissant le gouvernement des Etats-Unis que l’organisation états-unienne devait se plier aux lois boliviennes ou bien s’en aller. Mais il n’est pas facile d’éradiquer les réseaux d’ingérence et de subversion. Le Président Chávez, de son côté, a proposé dans sa réforme constitutionnelle une modification de l’article 67 interdisant le financement aux groupes ayant des objectifs politiques et aux campagnes politiques provenant de l’étranger.
Mais, alors que les droits humains sont un thème fondamentalement politique, les ONG qui les promeuvent refusent en général d’admettre qu’elles ont des buts politiques. C’est justement là que se dissimule la subversion de Washington, utilisant les ONG comme bouclier.