(www.adital.org.br)
(Rapport de l’agence Lavaca, coopérative de travail créée en 2001 pour recenser des outils, des savoirs, créer des liens et mettre ces données à disposition des organisations sociales. Le thème en est : « Production de soja dans les Amériques : actualisation sur l’usage des terres et des pesticides ».)
La monoculture du soja avance, provoquant des défrichements, des déboisements, des concentrations de terres et des déplacements de populations.
La « grande patrie » du soja est constituée du Brésil, de l’Argentine, du Paraguay, de la Bolivie et de l’Uruguay. Ces cinq pays totalisent 47 millions d’hectares de soja transgénique, pilier du modèle de l’agro-négoce, avec une forte consommation de produits chimiques et avec, comme principales bénéficiaires, les entreprises multinationales. Ce modèle, avec ses conséquences sociales et environnementales, s’est installé durant la période actuelle sous des gouvernements « progressistes ».
Le soja occupe de grandes superficies :
– 66 % de la terre cultivée du Paraguay,
– 59 % » » » d’Argentine,
– 35 % » » » du Brésil,
– 30 % » » » d’Uruguay,
– 24 % » » » de Bolivie.
Dans ces cinq pays, 44 % de la terre cultivée n’a qu’une seule culture : le soja.
Agriculture industrielle.
L’histoire du soja a commencé il y a plus de cent ans. Mais c’est durant les 40 dernières années, et surtout les 20 dernières, qu’elle a opéré une rapide transformation et expansion à travers un modèle d’agriculture industrialisée. Le soja transgénique avance dans tous ces pays. Les autres cultures sont en régression, l’utilisation des produits agro-toxiques est en augmentation et les cinq pays ont mis de larges secteurs de leur territoire à disposition des besoins de l’Europe et de l’Asie.
Le Brésil et l’Argentine sont les élèves les plus appliqués de ce modèle : à eux deux ils concentrent 90 % de la superficie de soja de la région. En 2010 les cinq pays ont semé en tout 47 millions d’hectares de soja. De ce total, le Brésil représentait 50%, l’Argentine 40 %, le Paraguay 6, la Bolivie 2 et l’Uruguay 2.
L’étape de croissance accélérée a débuté en 1996 avec l’approbation de variétés de soja génétiquement modifié pour la production commerciale par l’Argentine.
Moins de forêts.
En 1991 l’Argentine comptait 34,5 millions d’hectares de forêts. En 2009 cette superficie n’était plus que de 29,6 millions d’ha, une réduction de 14%. Parallèlement la Bolivie a perdu 8 % de sa superficie boisée, la Brésil 9 % et le Paraguay 15 %.
Recul des autres cultures.
En Bolivie la surface cultivée en maïs a diminué de 3 % et au Paraguay la culture de Yuca a diminué de 27 %. Mais c’est l’Uruguay qui présente le cas le plus préoccupant : non seulement le tournesol a diminué de 72 %, mais aussi les pâturages destinés à la production de bétail laitier se sont réduits de 15 % et ceux destinés à la production de bovins pour la viande ont diminué de 30 %.
De grandes surfaces et peu d’exploitants.
La majeure partie de la production de soja dans le Cône Sud se produit sur des étendues d’au moins 500 hectares. Ce processus de concentration de terres va s’accentuant. Un nombre de plus en plus réduit de producteurs exploitent des surfaces de plus en plus grandes. Et l’intense industrialisation de la production implique l’accroissement de la capacité d’investissement des producteurs .
En Bolivie, en 2010, 2 % des producteurs de soja contrôlaient 52 % de la superficie de production. La même année, en Argentine, plus de 50 % de la production était contrôlée par 3 % du total de producteurs, qui cultivaient des superficies de plus de 5 000 ha.
Davantage de pesticides.
L’extension du soja transgénique avec les semailles directes sont les principales causes de l’utilisation croissante des produits agro-chimiques, en particulier du glyphosate. Et comme sont apparues des maladies résistantes à cet herbicide, on a recouru à d’autres agro-toxiques, encore plus virulents (24D et paraquat). « L’herbicide Paraquat a été interdit en Europe, mais son importation et son utilisation dans le Cône Sud sont en augmentation », dénonce l’enquête. Le paraquat est l’ingr0édient actif d’un herbicide très utilisé : gramoxone, commercialisé par la compagnie suisse Syngenta. « Des études toxicologiques ont montré le lien entre le paraquat et certains troubles neurologiques (p. ex. la maladie de Parkinson) et reproductifs. En 2003 il fut interdit dans 13 pays d’Europe, et finalement en 2007, dans toute l’union Européenne. »
Rôle des multinationales.
L’enquête fait ressortir que la production massive de soja dans le Cône Sud est principalement influencée par la globalisation de l’économie et que la demande provient de régions géographiquement distantes : l’Europe et la Chine. Quelle est l’utilisation de ce soja qui envahit les sols latino-américains ? L’alimentation animale et la matière première des agro-carburants.
Le rapport conclut : « la demande de soja en Europe impacte la dynamique de l’utilisation des terres et des pesticides en Amérique du Sud. Les besoins locaux, par exemple la demande de produits non destinés à l’exportation, perdent de leur intérêt dans la dynamique productive ». Un exemple clair est l’emploi d’intrants dangereux et de technologies à risques dans les pays producteurs du Cône Sud, alors que ces mêmes produits et technologies sont prohibés dans les régions d’origine de la demande (Europe). Il existe des standards différenciés de protection environnementale et de santé publique dans les lieux d’origine de la demande et ceux de la production.
Le modèle d’agro-négoces, dont le soja est la face la plus visible, se caractérise par le contrôle qu’exercent les grandes multinationales de l’agro. Le marché des semences représente une situation emblématique : « Dans la première moitié du vingtième siècle, les semences étaient indiscutablement dans les mains des agriculteurs et du secteur public. Dans les décennies suivantes, elles furent monopolisées par les géants génétiques et le pouvoir des multis. Le marché des semences patentées représente maintenant 82 % du marché des semences commercialisées dans le monde entier. »Les dix principales compagnies détiennent 67 % du marché des semences patentées : Takii (Japon) – DLF-trifolium (Danemark)- Sakata (Japon) – Bayer Crop Science (Allemagne) – KWS AG (Allemagne) – Land O’Lakes (Etats-Unis) – Groupe Limagrain (France) – Syngenta (Suisse) – DuPont (Etats Unis) et Monsanto (Etats-Unis).
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